Chapitre 14 : Héritage
Troisième fois que je traverse ce train de long en large. J'espère retrouver l'inconnu, même si mes chances sont minces, mais non... Je ne le vois nul part. Je me rassois à ma place frustrée et triste, déçue surtout. J'avais espéré ce moment depuis quinze jours.
Je repense à mon père, j'espère du fond du cœur qu'il se trouve quelqu'un jusqu'au moins ma prochaine venue. Je n'avais pas vu en arrivant dans quel état de manque sexuel il était. J'ai compris qu'il perd certains repères. Il passe certainement trop de temps à regarder de la pornographie. Je me suis tout de même soumise à ses volontés, et j'y ai éprouvé de temps à autres un peu de plaisir.
Cependant, ça m'a fait bizarre lorsqu'il me demande de poser pour des photos rien que pour lui, alors que je m'étais déguisée une nouvelle fois en chatte à sa demande, en y ajouter un porte-jarretelles et des bas résilles. Il me dit :
- Ça m'aidera à passer ces longues nuits d'hiver seul.
- T'as pas peur qu'on tombe dessus un jour ?
- Je ferai très attention.
J'ai tout de même accepté, mais en gardant en crainte qu'un jour elles soient volées, ou même que mon père les mette sur internet après un moment de folie. Je l'en sens bien capable… je me fais des idées, je deviens parano.
De petites poses coquines, je suis passée à d'autres plus chaudes, et je dois dire que ça a été certainement le moment le plus excitant que j'ai eu avec mon père durant ces vacances, me prenant entièrement au jeu. Quelques centaines de photos plus tard, je me sentais l’âme d’un modèle porno avec mon plug dans le cul et mon vibromasseur dans la chatte. Il était des plus logiques qu'il continue à me photographier lorsque je l'ai sucée comme une sauvage en manque de bite ou lorsqu'il me prit dans des positions les plus extravagantes.
Mais, avec mon père, il n'y a pas eu que des moments sexuels, même s'il me prenait le matin avant d’aller à son travail et le soir en rentrant. Il y eu aussi des moments doux, des moments complices, et une méga dispute concernant mon appartement. Je comprends le fait qu’il n’ait pas les moyens de tout payer. Mais je lui en ai voulu de ne pas avoir su convaincre ma mère de régler ses dettes. Il m’a fait :
- Eh bien, appelle-la toi ! On verra si t’as plus de chance que moi. Elle s’en fout ta mère.
- Oui, je vais l’appeler ! Et tu verras bien, sale connard !
- Je t’interdis de m’insulter, sale petite conne !
- Couille molle, p’tite bite… Haaa…
Il me gifla, m’attrapa par les cheveux, relava ma jupe, arracha mon string en me disant « Je vais t’apprendre à bien te comporter avec moi ! ». Il m’avait pénétrée sauvagement, me faisant mal, me faisant du bien en même temps, puis lâcha son emprise après avoir éjaculé en moi. Histoire d’avoir le dernier mot, il me dit :
- … Ne recommence pas !
- Pfff… Un vrai mec aurait tenu bien plus longtemps… Bon, j’appelle ma mère.
Je ne l’ai pas eu, juste son répondeur. Un peu plus tard dans la soirée, je reçus d’elle un MMS, une photo d’elle en maillot de bain à la plage avec comme message : « J’espère que tu as passé un bon Noël. Moi, je m’éclate comme une folle. Bisous ma fille, ta mère qui t’aime ». J’étais énervée, je suis allée voir mon père, je l’ai giflé en lui disant « Alors couille molle, pas capable de me donner une autre leçon ? ». Il me sourit, me caressa tendrement la joue et me dit « Je suis désolée ma fille. Ta mère est … On ne peut pas changer de parent. Va chercher ton vibromasseur, je vais te réconforter avec ».
Voilà, mon père ne pouvait pas payer, je ne voulais pas lâcher mon appartement et ma mère est et reste qu’une sale grosse conne égoïste.
Je repense aux appels à répétition de la police. Le dernier, c’était un des chefs, un responsable. Il tenta de m’intimider, et il réussit. Mais j’ai gardé mon calme et je lui ai dit qu’au prochain appel, je prendrai un avocat pour porter plainte pour harcèlement, et également pour maltraitance. Je lui ai rappelé que j’avais été arrêtée, menottée, interrogée comme si j’étais coupable de quoi que ce soit.
Il changea son discours, tenta de jouer sur les sentiments, son mon empathie :
- Comprenez que mon but est d’éviter qu’il y ait d’autres victimes.
- Je ne suis pas une victime. J’ai été abusée, c’est tout. Mais, c’est fini, je ne veux plus rien avoir à faire avec cette histoire.
- Vous ne pouvez pas dire ça…
- Je peux. J’étais consentante, comme les autres avant moi.
- … Avant vous ? Il y en a eu d’autres ?
- Faites votre enquête sérieusement. Ne me rappelez plus jamais. Tout ça s’est du passé pour moi et qui n’a aucune importance. Au revoir, monsieur.
Et j’avais raccroché, et ils ne m’ont pas rappelée.
Le train est sur le point de rentrer en gare. Je me demande si le livre que j’ai trouvé pour offrir à André va lui plaire. Pourtant, lorsque je l’ai vu, je n’ai eu aucun doute : « relations entre un peintre et son modèle ».
Je crois que je n’ai jamais marché aussi vite pour arriver à mon appartement. Je suis pressée de le voir. L’ascenseur semble mettre trois heures à monter. Je me dis que j’aurais dû prendre l’escalier, j’y serais allée plus vite. Et enfin, je me retrouve sur le palier. Je veux poser mon sac avant d’aller sonner chez lui, mais je suis surprise de voir sa porte d’entrée ouverte. Je frappe doucement « André ? », j’entre… il manque des meubles. Et une voix derrière moi me fait sursauter « Puis-je savoir ce que vous faites là ? ». Je me retourne. Un homme que je ne connais pas, mais qui a un air de ressemblance avec André, se trouve devant moi. Il a un temps d’attente avant de me dire :
- Vous êtes Pauline, n’est-ce pas ? C’est fou comme mon père a su aussi bien reproduire votre visage.
- … Et… Il est où ?
L’homme a les yeux rouges, je commence à pleurer en me doutant de la réponse qui n’arrivera jamais. Alors, je demande :
- Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
- Vous lui aviez dit d’aller voir un docteur, n’est-ce pas ?
- Oui. Je m’inquiétais, il toussait beaucoup.
- Il ne l’a pas fait. Quelqu’un de l’immeuble l’a retrouvé inconscient devant l’ascenseur. Il a été amené aux urgences. Mais, ses poumons étaient trop touchés… Il est resté trois jours à l’hôpital avant de…
- … Mais… Ce n’est pas possible… J’ai un cadeau pour lui, un livre… Il ne peut pas… Est-ce que je peux venir à la cérémonie ?
- Elle est déjà passée.
Mes jambes me lâchent, je tombe à genoux devant cet homme, pleurant tout ce que je peux. Il me faut plusieurs minutes pour me ressaisir, il m’invite à m’assoir. Et je demande :
- C’est arrivé quand ?
- Il est décédé le jour de Noël… Il n’arrêtait pas de parler de vous, tout le temps. Il n’y en avait que pour vous. Il vous avait mis sur un piédestal tellement haut que j’ai pensé que vous étiez en train de le manipuler. Mais, j’ai vu à votre réaction que je me trompais. J’espère que vous m’excuserez.
- Bien sûr, évidemment.
- Il m’a forcé à préparer une enveloppe pour vous… Attendez, je vais la chercher… Jusqu’à cet instant, je n’avais pas l’intention de vous la donner.
Il part quelques secondes et revient avec. Il me la donne, il y a une lettre et un chèque. Je ne regarde même pas le montant, je m’en fous, c’est la lettre qui m’intéresse.
« Ma chère Pauline,
Je crains qu’il ne faille remettre à plus tard notre peinture. Je n’ai malheureusement pas été très sage et je n’ai pas tenu ma promesse. Et me voilà à l’hôpital avec aucune chance d’en sortir. Je regrette, j’avais enfin une raison de continuer à vivre.
Je vais m’arrêter là dans cette lettre. Il ne me reste pas beaucoup de force. Et pourtant, j’aurais tellement de chose à t’écrire.
Ne pleure pas un vieil homme, tu as toute ta vie devant toi.
Je t’aime,
Ton André »
Je pleure à nouveau. Je regarde le fils d’André et lui pousse le chèque :
- Je n’en veux pas. Je n’ai jamais rien fait pour ça.
- Prenez-le, c’était sa dernière volonté. Et ne vous affolez pas sur le chiffre. Mon père était bien plus riche qu’il ne voulait le montrer.
Je me décide à le regarder… Je ne comprends pas ce que ça représente, il y a trop de zéros à la fin. Je n’ai jamais vu un tel montant. Et pourtant, ça ne me ferait ni chaud ni froid de le mettre à la poubelle.
Il pose en face de moi une grande pochette, et le fils me dit :
- C’est pour vous aussi. Mon père m’avait fait jurer de ne pas regarder…
- Il y a quoi dedans ?
- Tous ses dessins de vous, des plus simples aux plus intimes.
Nous avons encore un peu discuté, mais il est temps de se quitter. Et juste avant que je ne rentre dans mon appartement, il me demande :
- Je ne devrais pas vous poser cette question, mais j’aimerai savoir si vous avez été la maitresse de mon père ?
- Oui, une seule fois. J’aurai aimé que ça se reproduise.
Je rentre chez moi, et je pleure encore et encore. Il fait nuit, je suis dans ma cuisine à regarder le fils d’André remplir des cartons et les amener je ne sais où. Puis, les lumières s’éteignent, j’appelle mon père.
- Ma puce, je commençais à m’inquiéter de ne pas avoir de nouvelles. Ton voyage s’est bien passé ?... Pauline ?... Tu es là ?
- Je veux déménager.
- … Ok… Tu pleures ? Que se passe-t-il ? Est-ce que ça va ?
- Non.